Pétition en ligne : comment un client vient de faire plier la 1ère banque espagnole


Un simple particulier peut faire basculer une grosse entreprise en créant une pétition en ligne. C’est ce qu’a réussi un aubergiste espagnol début février face à la première banque de détail du pays via la plateforme change.org. Olivier Cimelière directeur d’Heuristik Communication décrit comment la banque Caixa est revenue sur sa décision et a communiqué vers les pétitionnaires. 

Alberto Segura n’est qu’une personne parmi les 25 000 pétitions lancées chaque mois sur la plateforme Change.org. Pourtant, il a réussi en deux jours à faire plier Caixa Bank,le  n°1 de la banque de détail en Espagne grâce une pétition en ligne. Encore plus inédite est l’attitude de la banque incriminée. Elle a choisi de répondre en direct à son client mécontent et à tous les signataires grâce au nouvel outil « Décideurs » que Change.org vient de mettre en place pour les marques et les entreprises.

Des frais exhorbitants


Le 3 février dernier, Alberto Segura était particulièrement remonté. Tenancier d’une auberge dans la région de Saragosse et client depuis toujours de la Caixa Bank, il comprend avec stupéfaction que l’établissement bancaire va désormais appliquer des frais financiers pour consultation en ligne de ses comptes personnels et professionnels. Des frais qui peuvent osciller entre 10 et 100 € par mois selon l’usage. C’en est trop pour le fidèle client.

Une pétition éclair


Fermement décidé à ne pas se laisser faire, Alberto Segura se connecte aussitôt sur la version espagnole de Change.org. En Espagne, la plateforme est apparue en 2011 et elle s’est imposé comme un outil privilégié pour faire entendre sa voix sur différents sujets sociétaux.

Aujourd’hui, l’Espagne est le 3ème pays de Change.org et compte plus de 5 millions de citoyens qui ont déjà apposé leur signature sur l’une des 3000 pétitions qui surgissent chaque mois dans le pays et dont 1,6 million ont contribué à des pétitions réussies. Avec plusieurs succès retentissants à la clé que l’on peut consulter sur le site espagnol.

L’aubergiste se lance donc dans l’aventure pétitionnaire. En quelques clics, il publie son manifeste exigeant de Caixa Bank l’abandon immédiat de cette tarification qu’il juge déplacée et excessive, particulièrement en ces temps d’austérité sévère en Espagne. Le succès de la pétition est fulgurant. En 48 heures à peine, le compteur des signataires grimpe à 74 260 personnes tandis que sur Facebook, 8000 internautes relaient l’appel. Devant une telle mobilisation spontanée, la Caixa Bank décide d’agir à son tour.

Retrait … et dialogue avec les signataires

La Caixa Bank prend contact avec Alberto Segura. Le directeur de l’agence de sa ville appelle personnellement puis rend une visite au domicile de l’aubergiste. Il s’engage à ne pas appliquer les coûts supplémentaires initialement réclamés et consent même à accorder un statut de client privilégié à Alberto Segura. La victoire est acquise et la pétition est stoppée dans la foulée.

Cependant, l’histoire ne s’arrête pas là. En plus d’être parvenu à calmer le jeu avec son client mécontent, la Caixa Bank prend contact avec les services de Change.org en Espagne. Objectif : s’excuser pour le malentendu et répondre clairement à toutes les personnes ayant signé la pétition d’Alberto Segura.

L’initiative tombe particulièrement à pic pour Change.org qui vient précisément de lancer depuis octobre 2013,  une nouvelle fonction baptisée « Decision Makers » (« Décideurs » en français). Ce module est spécialement destiné aux entreprises, aux institutions et aux partis politiques qui sont régulièrement interpelés sur la plateforme.

Avec ce nouvel outil, le « décideur » est aussitôt notifié lorsqu’apparaît une pétition en ligne qui le concerne. Celui-ci peut alors répondre et informer de facto le créateur de la pétition mais également les signataires. Quant au créateur, il peut alors commenter à son tour les réponses et animer ainsi une conversation permettant de déboucher sur une solution concrète.

C’est exactement cette voie qu’a empruntée la Caixa Bank pour annoncer le retrait des frais supplémentaires de consultation des comptes sur Internet. Quatre jours plus tard, le dossier était clos.

La pétition en ligne entre dans une nouvelle ère

Si cette anecdote vient confirmer une énième fois qu’un simple citoyen peut faire vaciller la réputation d’une entreprise grâce à une mobilisation numérique conséquente, la pétition créée par Alberto Segura inaugure également une nouvelle ère pour les plateformes de pétition en ligne.

A l’injonction collective mais unilatérale déclenchée par des individus, des ONG ou des associations, s’ajoute désormais une dimension conversationnelle dont les entreprises, les institutions et les influenceurs de la société ont tout intérêt à prendre la mesure.

L’outil « Decision Makers » n’est pas encore disponible sur le site français mais Benjamin des Gachons, directeur des campagnes Change.org pour la France, confirme d’ores et déjà que « Décideurs » est actuellement en cours de lancement avec notamment des présentations à venir auprès des agences de communication et de relations publiques qui gèrent des marques à forte visibilité ou des grands comptes susceptibles d’être apostrophés par le corps sociétal.

Les entreprises intéressées peuvent effectuer leur demande auprès de Change.org France pour créer un profil. La bonne vieille pétition avec stylo et feuille de papier atteint désormais des niveaux d’interactivité qui augurent d’intéressants cas d’étude.

Olivier Cimelière

Littéraire dans l’âme, journaliste de formation et communicant de profession, voilà pour le tableau synoptique express d’Olivier Cimelière. Olivier a 20 ans d’expérience et un parcours plutôt original dans des secteurs d’activité très variés. Expert en stratégie de communication d’entreprise et de réputation des dirigeants, il est directeur d’Heuristik Communications et anime le blog du communicant 2.0. Depuis avril 2014, il est directeur associé de l’agence d’image et opinions Wellcom.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *