Les dix crises qui pourraient changer beaucoup de choses dans le numérique d’ici 2030-2040

Jean-Claude Laroche, Président du Cigref, 11 octobre


Les DSI des grandes entreprises entendent se préparer aux crises à venir. Le rapport « 10 ruptures à l’horizon 2030-2040 » est établi par le Cigref, l’organisation des DSI des grandes entreprises françaises. Ce rapport étudie dix hypothèses de rupture qui pourraient intervenir d’ici 2030 à 2040. Il a été présenté à l’occasion de l’assemblée générale du Cigref, le 11 octobre 2023, lors de la 53ème édition de cet événement fondé en 1970.

Le Cigref rappelle qu’une crise comme celle déclenchée par le virus de la Covid qui a secoué le monde en 2020 avait été prévue par les prospectivistes depuis 20 ans. Travailler sur des ruptures est pour les DSI une manière de se préparer à faire face à des événements soudains et inattendus et à renforcer leur résilience.

L’informatique quantique fonctionne en 2030


Selon les hypothèses de rupture, d’ici 2030, l’informatique quantique deviendrait opérationnelle et largement diffusée. Les entreprises doivent s’y préparer dès aujourd’hui. Par exemple, chez l’assureur Axa on s’inquiète que des hackers ne captent les transactions et les contrats signés actuellement qui sont chiffrés et sont conclus pour plusieurs années afin de les déchiffrer grâce au calcul quantique lorsque celui-ci fonctionnera en 2030.  Il faut donc s’y préparer dès aujourd’hui (à l’instar de ce que Docaposte, filiale de La Poste, annonçait en début d’année) même si les qbits (puissance de calcul quantique) manquent encore de stabilité et qu’il y a des erreurs de calcul dans le quantique.

La virtualisation des télécoms fait monter en puissance les acteurs du Cloud comme nouveaux opérateurs

Autre évolution possible, celle des réseaux mobiles, la 5G, la 6G et l’Open Ran. Ces technologies accélèrent la virtualisation, l’automatisation et la désagrégation des réseaux télécoms. De nouveaux acteurs opèrent les réseaux télécoms. Cette évolution permettrait à des acteurs comme VMware, RedHat ou les géants du Cloud d’entrer sur le marché des services télécoms en proposant des offres différenciées en termes de souplesse, de débit et de latence. Les acteurs du Cloud prendraient le leadership par rapport aux équipementiers télécoms traditionnels tels que Ericsson ou Nokia. Orange lui-même annonçait engager la désagrégation de son réseau télécoms fin 2022.

Dans un tout autre domaine, entre 2030 et 2040, une hypothèse est qu’une tempête solaire de forte intensité pourrait toucher la terre, privant les entreprises de leurs réseaux électriques et de communication. Une telle tempête solaire aurait un impact majeur. Autre scénario plus classique d’ici 2040, l’Union Européenne imposerait à l’industrie numérique le recyclage à 100% de tous les composants matériels informatiques commercialisés en Europe. Les fabricants devraient revoir leurs processus afin que leurs composants puissent être recyclés. Conséquence, les coûts des produits électroniques pourraient augmenter.

Rupture des relations entre l’Europe et la Chine

Autre enjeu, d’ici 2035, les échanges commerciaux entre la Chine et l’Europe seraient durablement interrompus en raison des tensions entre la Chine et les Etats-Unis, notamment en cas d’invasion de Taïwan par la Chine. De même, les conceptions différentes en matière politique et économiques pourraient interrompre les relations entre la Chine et l’Europe. Les conséquences d’une telle rupture seraient importantes.

Si les Etats-Unis adoptent une politique protectionniste, cela impactera les entreprises européennes

Dans le même registre, d’ici 2035, les Etats-Unis pourraient se distancier de l’Union Européenne et adopter une politique très protectionniste. Cela impacterait les entreprises européennes qui entretiennent des liens étroits avec les entreprises américaines.

Autre scénario, d’ici 2040, le modèle de Microsoft, Amazon et Google s’effondre. Leur croissance se ralentit et leur capitalisation boursière s’effondre progressivement. Cela pourrait venir d’une incapacité de ces entreprises à s’adapter aux évolutions techniques ou aux usages du numérique, ainsi qu’aux cadres réglementaires sur la concurrence. Ces géants dépendent également de chocs géopolitiques, environnementaux ou économiques. De nouveaux acteurs pourraient alors émerger mais l’accès au numérique pourrait aussi devenir plus difficile.

2040 : l’Europe devient une puissance du numérique

Hypothèse d’ici 2040, l’Europe pourrait consolider une industrie du numérique performante qui renforce son indépendance stratégique. Il faudrait notamment des investissements massifs, l’arrêt de la guerre en Ukraine et un retour à la stabilité. Cela permettrait l’émergence de sociétés dans l’intelligence artificielle, la cyber sécurité et le quantique.

Autre possibilité, d’ici 2035, les populations européennes font l’objet d’une surveillance globale par les outils numériques

Autre possibilité, d’ici 2035, les populations européennes font l’objet d’une surveillance globale par les outils numériques aussi bien par les acteurs publics que privés. Les gouvernements justifieraient cette évolution par les menaces sécuritaires et une aversion croissante au risque dans les populations. Les géants du numérique seraient partie prenante de cette évolution. Ce mouvement entrainerait des risques d’abus de pouvoir et des inégalités sociales et économiques.

Enfin, d’ici 2030, les progrès de l’IA et en particulier de l’IA générative modifient radicalement l’organisation du travail. L’IA pourrait automatiser de nombreuses tâches, entrainer des pertes d’emplois et nécessiter des reconversions professionnelles. Côté positifs, le temps de travail pourrait être réduit.

Modifications en profondeur


Dans le rapport du Cigref, les ruptures sont définies comme étant « des événements ou des phénomènes, susceptibles de modifier en profondeur l’environnement naturel, politique, économique ou social d’une société ou d’une organisation ». Les dix hypothèses traitées dans le rapport « 10 ruptures à l’horizon 2030-2040 » ont été identifiées par le Cigref et par Futuribles, sur la base de la veille réalisée ces trois dernières années.

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