Cnil et Conseil national du numérique
C’est la teneur d’une tribune « Chiffrement et lutte contre le terrorisme : attention à ne pas se tromper de cible », co-signée principalement par le Conseil national du numérique (CNnum), un organisme hautement politique puisque ses membres sont nommés par le Président de la République, et la Cnil. On y trouve également la signature de Gilles Babinet, entrepreneur et Digital Champion pour la France auprès de la commission Européenne, habituellement critique des procédures contraignantes mises en place par la Cnil.
Les méta données donnent déjà beaucoup d’informations
Autre point avancé, les terroristes sauront de toute façon utiliser des techniques de chiffrement logiciel sans employer les applications Telegram ou WhatsApp. Ce seront donc les citoyens lambda qui seront pénalisés. Il faut conserver le principe d’un chiffrement inviolable, il est le garant de nos libertés.
Efficacité limitée
Les portes dérobées auront une efficacité limitée
Au passage, la tribune pointe que la volonté du gouvernement entre en contradiction avec d’autres lois, notamment la loi pour une République numérique, qui confie à la CNIL la mission de promouvoir les technologies protectrices de la vie privée, dont le chiffrement.
La tribune reconnaît toutefois qu’un chiffrement robuste complique le travail des enquêteurs, surtout lorsque le chiffrement s’opère de bout-en-bout, c’est-à-dire lorsque le fournisseur du service ne détient pas les clés de déchiffrement.
Créer une clé universelle d’accès
Le chiffrement est essentiel à la sécurité des citoyens
La création de « portes dérobées » (backdoors) n’est pas une solution pour les signataires. « Quelle confiance avoir dans la porte blindée de son domicile si l’on sait qu’il existe une clé universelle pour l’ouvrir, quand bien même cette clé serait officiellement détenue que par la police ? » Imaginerait-on construire toutes nos maisons avec un accès police à celles-ci au cas où un meurtre ou un vol y serait commis, demandent-ils ?
La tribune cite l’Agence Nationale de Sécurité des Systèmes d’Information (ANSSI), organisme gouvernemental, qui souligne qu’il est techniquement impossible de s’assurer que de tels accès ne soient disponibles qu’au profit des personnes autorisées. À tout moment, ces portes dérobées peuvent devenir des portes ouvertes pour les organisations pirates, mafieuses, et terroristes.
Il est impossible de s’assurer que seules les personnes autorisées utiliseront ces accès
Ses propres technologies de chiffrement
La volonté d’accéder en clair à toutes les communications chiffrées se heurtera de toute façon au fait que les technologies de cryptographie sont à la portée de n’importe quelle organisation criminelle, déclare la tribune. Les terroristes pourront coder leurs propres applications chiffrées.
Les terroristes sauront créer leurs propres applications chiffrées
Côté accès aux données chiffrés, les signataires proposent de contourner le chiffrement en exploitant des failles techniques ou en s’introduisant directement dans l’équipement de la personne ciblée.
D’autre part, si le contenu des communications est chiffré, les métadonnées, elles, restent le plus souvent en clair : qui échange avec qui ? Quand et combien de temps ? Où était-il localisé ? Ces données répondent aux questions les plus importantes sur les habitudes des gens, leurs fréquentations, leurs centres d’intérêts, leurs opinions, estiment les signataires.
Coopérer avec les fournisseurs
La tribune propose plutôt de coopérer avec les fournisseurs de produits et de services sécurisés dans l’accès judiciaire aux données. Cela comprend les accords bilatéraux entre États – les mutual legal assistance treaty (MLAT) – qui permettent l’échange d’informations et de données lors d’enquêtes afin de réduire les délais de transmission.
En conclusion, la tribune estime que le chiffrement permet l’exercice des libertés fondamentales. Il constitue un rempart contre l’arbitraire des États et protège contre le contrôle croissant des acteurs économiques sur la vie de chacun d’entre nous.
Le chiffrement permet l’exercice des libertés fondamentales
La tribune est co-signée par le Conseil national du numérique, la Cnil, Gilles Babinet (Digital champion de la France auprès de la Commission européenne), Nathalie COLLIN, DGA du Groupe La Poste en charge du Numérique et de la Communication, Pascal Daloz, DGA chez Dassault Systèmes, Rand HINDI, Fondateur de Snips et Daniel KAPLAN, Délégué général de la Fondation pour l’Internet Nouvelle Génération (la FING).