C’est préoccupant dans la mesure où sur Wikipedia, peuvent subsister pendant des mois des informations erronées, farfelues ou diffamatoires sans que personne ne les corrige. Sans parler des luttes militantes et des foires d’empoigne sur certains sujets sensibles où une page Wikipedia peut alors changer sans cesse de contenu, passer d’une version à une autre sans aucune cohérence, ni vérification solide.
Pourtant sur Google, c’est Wikipedia qui continue inéluctablement à émerger en priorité. Certains analystes s’interrogent d’ailleurs sur une possible connivence entre les deux sites. Dans mon livre [NDLR : page 410], je cite notamment le résultat d’une étude menée en 2012 par Intelligent Positioning. Le résultat parle de lui-même : sur un millier de requêtes, Wikipedia arrive sur la première page des résultats de Google UK dans 99% des cas ! Là encore, c’est un problème pour les libertés individuelles et le droit à l’oubli. Même si vous effacez un contenu gênant, Wikipedia peut en permanence le ramener parce qu’untel estimera qu’il est nécessaire.
Question : à plusieurs reprises dans votre livre, vous déplorez la communication silencieuse ou alors a minima et stéréotypée de ces entreprises et notamment Google. Selon vous, de quelle manière devraient-elles évoluer dans leur façon d’interagir avec leurs publics plutôt que se retrancher derrière des discours artificiels et un peu trop « Bisounours » ?
Daniel Ichbiah : C’est peu de dire qu’effectivement la communication de ces sociétés est extrêmement réduite, totalement dépersonnalisée et fortement encadrée. Si vous êtes un journaliste, vous pouvez espérer accéder à un interlocuteur mais ce n’est pas pour autant que vous aurez une réponse précise.
Généralement, on reçoit plutôt des paragraphes calibrés et lénifiants. La seule exception où le contact est particulièrement réactif, c’est lorsque vous voulez réaliser de l’achat d’espaces ou de mots-clés. Là, vous êtes garanti d’avoir illico un commercial pour vous prendre en charge.
En revanche, pour le commun des mortels, il est très difficile, voire impossible d’obtenir des informations. Même si vous envoyez un courriel, celui-ci restera soit sans retour, soit avec une réponse aseptisée et anonyme ou flanquée d’un seul prénom.
Je trouve cette démarche contre-productive. Bien des affaires pourraient se régler rapidement et simplement à travers un coup de fil ou une réponse adaptée. Au lieu de cela, on néglige. Parfois, cela prend en effet une vilaine tournure qui peut aller jusqu’au procès ou à la polémique médiatique. Mais même dans ces cas-là, Google et consorts s’en tirent toujours en procédant à des règlements à l’amiable qui dégonflent l’affaire.
Je déplore vraiment l’irresponsabilité sociétale de ces sociétés qui n’assument pas les conséquences parfois problématiques de leurs services. Elles préfèrent continuer comme si de rien n’était et éventuellement transiger lorsque la situation empire ou lorsque la contestation se fait jour. Cela a été le cas par exemple avec Google et sa numérisation à tour de bras des ouvrages des bibliothèques.
L’entreprise s’est servi librement sans se soucier au préalable des ayant-droits éventuels mais plutôt en réglant au cas par cas. C’est un peu comme si quelqu’un ouvrait votre frigo, le dévalisait tranquillement en vous demandant si ça ne vous dérange pas jusqu’au moment où vous râlez !
Question : Google a fait la Une de l’actualité avec l’inauguration de son Centre culturel à Paris, l’annonce d’accords avec des constructeurs automobiles, les acquisitions de Nest (un thermostat intelligent) et de Deep Mind, une société d’intelligence artificielle et enfin le projet de lentilles connectées pour diabétiques. Va-t-on vers l’avènement d’un « Big Brother » et de surcroît très proche semble-t-il de la NSA depuis les révélations d’Edward Snowden ?