En matière de ciblage publicitaire des internautes, le temps presse pour les professionnels, et l’année 2021 doit absolument accoucher de nouvelles méthodes efficaces. Pour l’heure, c’est la confusion improductive qui règne quand on écoute l’IAB France (Interactive Advertising Bureau), l’association qui réunit les professionnels de la publicité digitale.
Tenir compte du RGPD et de la fin des cookies tiers
L’horloge est démontée sur le tapis du salon et il est difficile de prédire comment elle va être remontée. Les professionnels du secteur doivent progresser en tenant compte des exigences de protection de l’internaute arrivées avec le RGPD en mai 2018 et depuis l’annonce de la fin des « cookies tierce partie » promise par Google pour 2022.
Trois approches répondent à la suppression du cookie « tierce partie », le ciblage individuel, le ciblage par cohorte et le ciblage contextuel
Dans le détail, pour un ciblage individuel, plusieurs dispositifs sont possibles. Il existe la voie qui cherche à gagner du temps en transformant une information « tierce partie » concernant l’internaute pour qu’elle soit considérée comme un « cookie first party » qui lui n’est pas menacé de disparition. Des acteurs du secteur publicitaire proposent ainsi de s’appuyer sur l’URL (l’adresse web) pour identifier l’internaute. Le livre blanc de l’IAB France indique deux techniques : le « local storage » et la délégation de sous-domaine, le CNAME (Canonical Name, employé dans les DNS). La pratique du CNAME permet à des éditeurs « tiers » de déposer un cookie qui sera considéré comme « cookie first party » par le navigateur web.
Une identité affectée à chaque internaute
Autre voie du ciblage individuel, un identifiant de l’internaute est créé mais il n’est plus basé sur des cookies tiers. On suit le parcours de l’internaute après sa connexion, que ce soit via « Login » ou via « SSO » (Single Sign On), un système de login unifié pour l’accès à plusieurs sites web. L’identifiant peut être également délivré par un fournisseur d’identité, un « identity provider ». L’identification par « Login » exige de l’internaute une inscription (nom + mot de passe) pour accéder au service. Cet identifiant a été popularisé par Facebook, on le retrouve chez Google, Amazon ou Microsoft.
Le système de SSO est mis en place par des éditeurs indépendants qui mutualisent leur système d’identification
Toujours pour le ciblage individuel, côté fournisseurs d’identité, le livre blanc cite ID5 (ID5 Universal), LiveRamp (Authenticated Traffic Solution ou ATS), The Trade Desk (Unified ID), Zeotap (ID+), NetID ou encore Onelogin. Ces solutions ont des spécificités et des couvertures (« reach ») différentes. Enfin, il reste également pour le ciblage individuel, l’usage de l’Advertising ID, ou IDFA (Identifier for advertisers), un identifiant publicitaire inventé par Apple, repris par Google, et propre à l’univers des applications sur mobile. Cet identifiant est géré au niveau du système d’exploitation mobile. Il peut être réinitialisé par l’utilisateur.
Apple complique la vie des professionnels de la publicité digitale
Avec son nouveau système d’exploitation iOS14, Apple conserve l’IDFA mais prévoit de soumettre toute collecte à un consentement de la part de ses utilisateurs. La Mobile Marketing Association France pour sa part propose d’utiliser l’IDFA utilisé au sein des applications mobiles comme des identifiants publicitaires ré-initialisables sur le web et sur PC de bureau par l’internaute. Le cavalier seul d’Apple dans son usage de l’IDFA et la manière d’obtenir le consentement de l’internaute a déclenché une action commune des acteurs de la publicité digitale en France afin que la firme à la pomme abandonne sa volonté de durcir le processus de consentement.
Le durcissement de la procédure de consentement des internautes par Apple fait craindre à l’effondrement du taux d’acceptation
Google propose de nouvelles techniques de ciblage des internautes avec l’usage de cohortes « FLoC » ou « Federated Learning of Cohorts » ou via un dispositif de reciblage baptisé « Turtledove » ou tourterelle en anglais. La méthode « FLoC » regroupe des internautes ayant le même comportement de navigation, principalement basé sur les URL de sites web. Les annonceurs pourraient ensuite exposer leurs publicités à ces différentes cohortes avec un ciblage réalisé dans le navigateur web. Un utilisateur ne peut appartenir qu’à une seule cohorte.
Un usage d’API pour cibler les internautes chez Google
La méthode « Turtledove » vise à remplacer les pixels, parfois placés sur les pages d’un site pour suivre le comportement des internautes, par une API permettant de classer les internautes dans des groupes d’intérêt, accessibles à certains partenaires. Ces groupes pourraient ensuite être exposés à des campagnes publicitaires et à du reciblage, via le navigateur web. Les solutions proposées par Google sont critiquées pour leurs contraintes, et en mai 2020, le français Criteo a soumis le projet Sparrow (Secure Private Advertising Remotely Run On Webserver) afin d’améliorer « Turtledove ».
Google et Criteo rivalisent de propositions autour de l’initiative Privacy Sandbox de Google
Enfin, il y a la 3ème possibilité de ciblage publicitaire, qui est le ciblage contextuel. Il n’y a pas de collecte d’identifiants individuels des internautes. Le ciblage est réalisé à partir de la navigation web de la personne et l’affichage publicitaire tient compte du contenu affiché et de l’environnement. Le message publicitaire est diffusé au moment où l’utilisateur est concentré sur une thématique précise. Le ciblage contextuel peut s’effectuer par rubrique, par mot clé ou par analyse sémantique et par analyse du contenu multimédia.
Le ciblage par association entre contenu et centre d’intérêt
Le ciblage éditorial basique consiste à associer un contenu à un lectorat. Par exemple, un site web sur le sport attire des hommes, un site web consacré à la mode est lu par des femmes. Pour gagner en précision, un ciblage par mot clef s’intéresse au contenu d’une page. Un robot de lecture des sites web, un « crawler », identifie les mots clés de l’URL ou de la page, afin de créer des segments spécifiques au sein d’un même site web ou « cross domain ».
La publicité contextuelle lit les contenus des sites web. Les informations sont agrégées pour créer des segments dans des « Data Market Places »
S’il y a une relation avec l’éditeur de contenu, la lecture des contenus peut être améliorée et les segments peuvent être affinés. Cette classification de l’internaute en fonction de sa navigation réalisée à la volée présente l’avantage de ne pas s’accompagner de collecte de données personnelles, et ne nécessite pas de consentement de la part des internautes. Le ciblage contextuel permet de cibler des audiences en affinité avec un contenu, de s’associer à des événements (sportifs, fêtes, célébration…).