Pierre Ruhlmann, Chief Operating Officer de la Banque Commerciale en France chez BNP Paribas fait le point sur les actualités de son secteur : intelligence artificielle, maturité technique des clients, organisation du travail en réseaux, etc. Pierre Ruhlmann interviendra lors de l’événement IN BANQUE 2024 le 20 juin à Paris dans le cadre du débat inaugural « Stratégies digitales & Innovations numériques ».
Question : quels sont les chiffres à connaître concernant la Banque Commerciale en France de BNP Paribas ?
Pierre Ruhlmann : nous opérons auprès de trois catégories de clients, sept millions de particuliers, 120 000 ménages dans la banque privée et près de 30 000 entreprises, ce qui fait de nous un acteur leader dans tous ces secteurs. Nous recensons environ 6,8 milliards d’euros de PNB et 22 000 collaborateurs, dont 16 000 directement au service de nos clients, ce qui représente près de 15 % de l’activité du groupe BNP Paribas.
Question : le marché, et surtout les clients, sont-ils arrivés à maturité sur le front des avancées technologiques ?
Pierre Ruhlmann : nous servons les clients de la société française, avec le niveau de maturité qui est le leur.
« Deux tiers de nos clients se connectent en moyenne une fois par jour à notre application mobile »
Question : sont-ils prêts à passer le cap de l’IA ?
Pierre Ruhlmann : nos clients veulent avant tout de la fluidité dans les interactions. Avec ou sans IA, ils attendent une réponse rapide et fiable. En interne, même si nous sommes convaincus que c’est un « game changer », nous sommes précautionneux car l’une de nos priorités majeures est la sécurité de l’information. Par exemple, l’utilisation de ChatGPT en interne est interdite pour éviter les fuites de données. Pour nos premiers cas d’usage, nous serons donc très vigilants sur ce thème de la sécurité de données.
« Nous testons aussi plusieurs LLM pour trouver le plus adéquat et qui fonctionnera dans nos infrastructures sécurisées »
De manière progressive aussi, nous testons aussi plusieurs LLM (les modèles de base pour le traitement et la génération du langage naturel dans le monde Open) pour trouver le plus adéquat et qui fonctionnera dans nos infrastructures sécurisées. La qualité et la cohérence des données qui nous permettent de faire notre métier de banquier sont cruciales. Si auparavant, nous avions une approche « silo-isée », avec une donnée juste mais servant un besoin bien particulier, nous imaginons que demain, l’IA, une fois qu’elle aura été bien entraînée, ira chercher les données pertinentes et mettra en évidence les bonnes réponses et surtout cohérentes.
Question : comment s’organise l’intégration de ces technologies dans les différentes activités ?
Pierre Ruhlmann : pour les deux prochaines années, nous avons prévu de travailler avec des « tribes », ces équipes pluridisciplinaires qui couvrent à la fois l’IT, les opérations, le marketing, et qui sont organisées par parcours client. Ce dispositif homogène est agile à l’échelle. L’intelligence artificielle va aussi poursuivre le travail d’amélioration entamé sur les parcours clients. Nous avons créé une IA factory dans le but de faire émerger puis consolider ces nouvelles compétences techniques de manière industrielle et efficace.
Question : quelles sont les conséquences sur l’organisation du travail dans les réseaux ?
Pierre Ruhlmann : c’est la suite logique de ce que je viens d’évoquer. Nos collaborateurs en réseau vont constater toutes les améliorations à la fois sur les parcours clients ou leurs process. Ce sont les premières conséquences de l’IA, et non pas le fait de remplacer les collaborateurs ou de supprimer des métiers comme on peut l’entendre çà et là. Leur métier va continuer de se développer avec une IA qui va permettre d’être plus efficace dans le conseil, la fiabilité des informations partagées, et la vitesse à laquelle elles sont délivrées.
« L’IA ne va pas transformer notre métier fondamentalement dans les prochaines années mais singulièrement l’enrichir »
Il ne s’agit pas d’une révolution, mais d’une amélioration accélérée de notre organisation. Dans un second temps, l’IA servira peut-être d’autres enjeux stratégiques sur le réseau, mais elle sera un déclencheur parmi d’autres de la manière dont nous faisons notre métier de banquier. Elle ne va pas transformer notre métier fondamentalement dans les prochaines années mais singulièrement l’enrichir.
Autre sujet capital sur lequel nous devons sensibiliser nos équipes : l’intelligence artificielle, même si elle est fiable, peut présenter une marge d’erreur. Pour les collaborateurs, c’est relativement nouveau, car jusqu’à présent, l’informatique semblait infaillible. Avec l’IA, nous devrons toujours vérifier un certain nombre d’informations voire les améliorer, et c’est pour cela que nous aurons toujours besoin de l’expertise et du regard avisé de nos équipes, avec un certain esprit critique.
Pierre Ruhlmann interviendra lors de l’événement IN BANQUE 2024 le 20 juin à Paris dans le cadre du débat inaugural « Stratégies digitales & Innovations numériques ».