Le rapport CAP 22 qui propose de faire économiser 30 milliards d’euros à l’État et que le gouvernement ne souhaitait pas publier a été mis en ligne le 20 juillet par le syndicat Solidaires Finances publiques.
Accumulation de propositions de réformes de l’état
Le rapport de 152 pages préconise via 22 propositions de multiples réformes du fonctionnement de l’État, de ses administrations et de ses personnels dans l’objectif d’améliorer le service public tout en réduisant les coûts. Le recours à l’informatique et au numérique est systématisé avec l’usage des technologies les plus récentes.
En matière de réformes, tous les domaines sont profondément impactés : la santé, la sécurité sociale, la justice, l’éducation nationale, l’enseignement supérieur, les impôts, le logement, etc. Il est ainsi proposé le recours à des opérateurs pour réaliser les diverses missions à la place des administrations centrales telles que le recouvrement de l’impôt ou l’organisation du sport ou de la culture en France.
Des réformes proposent de réorganiser le travail de chacun. Côté enseignants, il est par exemple proposé d’augmenter les horaires de travail. Le rapport préconise de créer un nouveau corps de professeurs dans l’éducation nationale à partir des professeurs certifiés actuels. Ces nouveaux professeurs travailleraient 2 heures de plus par semaine avec une bivalence et une annualisation d’une partie de leurs horaires. Ces nouveaux professeurs bénéficieraient d’un plan de carrière plus dynamique et d’une rémunération supérieure.
Non remboursement des médecins qui ne jouent pas le jeu
Dans la santé, les professionnels exerçant en ville devraient travailler tous en coordination avec le système de santé sinon ils se verraient exclus du remboursement de leurs actes par la sécurité sociale.
En ce qui concerne le logement, le comité en charge du rapport propose de recentrer l’APL (Aide Personnalisée au Logement) et de mieux l’articuler avec les autres revenus de transfert afin d’en améliorer l’équité. Cela suppose de calculer désormais l’APL en prenant en compte, sans distinction d’origine, l’ensemble des revenus, les salaires, les revenus de transfert et les revenus de remplacement.
Le rapport recommande que l’on fasse appel systématiquement au numérique et à l’informatisation afin de faire bénéficier l’Etat et l’action publique des apports de la dématérialisation, d’internet, du mobile, de l’accès à distance, de la circulation plus fluide de l’information, du partage de données, de la télémédecine, de nouveaux traitements de santé, etc. Par exemple, à l’instar de la cour des Comptes, le rapport pointe que la direction des finances publique, la DGFIP ne dispose d’un budget informatique que de 150 millions d’euros annuels alors que les banques de réseau disposent d’un budget de 1 milliard d’euros.
Vers une société sans cash
Le rapport préconise une révolution technologique et de recourir aux dernières versions des solutions digitales. Par exemple, il s’agit d’aller progressivement vers une société sans espèces pour les paiements, à l’image de la Suède. La mise en œuvre de cette réforme conduirait à la dématérialisation intégrale des paiements aux administrations à horizon 2020. Si le comité chargé du rapport est convaincu que cette réforme est source d’économies importantes, il reconnaît qu’il n’a pas été en mesure de les chiffrer. Mais il indique qu’elle devrait permettre de lutter contre la fraude fiscale et donc d’accroître la rentrée d’impôts.
Le syndicat Solidaires Finances publiques qui a publié ce rapport s’inquiète pour sa part des propositions faites et estiment qu’elles casseraient l’Etat social. Il craint par exemple le fait de passer d’une logique de contrôles « a priori » à une logique de contrôles « a posteriori » recentrés et décrits comme plus efficaces par le rapport. Même inquiétude face à la proposition de sortir d’une culture de la norme encadrant toute décision, pour permettre aux agents de prendre des décisions adaptées au cas par cas.
Côté réalisation des projets informatiques qui doivent accompagner les réformes, on peut douter toutefois de la capacité de l’Etat à mener à bien cette informatisation. L’expérience montre que l’Etat est maladroit et très dépensier quand il s’agit d’informatiser ses lourds processus.
44 personnes ont travaillé au rapport
Les 44 membres de CAP22 ont travaillé pendant 21 semaines, répartis en 5 groupes thématiques, et ont réalisé des auditions de 18 ministres et de plus de 300 personnalités qualifiées, organisé des ateliers, échangé régulièrement avec les ministères. 24 contributions écrites ont également été reçues et ont nourri les réflexions. Le comité CAP22 a été lancé mi octobre 2017 par le Premier Ministre.
Le rapport estime que l’adaptation du service public ne pourra pas passer par une hausse de la dépense publique. Il pointe qu’en France, celle-ci est très nettement supérieure à celle de ses voisins : elle s’établit à 56,5 % du produit intérieur brut (PIB) en 2017 contre 47,1 % en moyenne pour la zone euro, et 43,9 % en Allemagne et qu’elle a augmenté plus que dans le reste de la zone euro.
De plus, le taux de prélèvements obligatoires est indiqué comme étant parmi les plus élevés avec 45,6 % du PIB contre 39 % en Allemagne et 40,1 % en moyenne pour la zone Euro si l’on inclut les cotisations sociales en 2016. La dette publique de la France s’établit à 96,5 % du PIB contre 64 % en Allemagne et 86,7 % dans la zone euro en 2017.