Business Models Disruptifs : le SI ne peut plus être cantonné à une fonction support

Hugues Le Bret, Président-Fondateur du Compte NICKEL, le 21 septembre

Sur le thème des « Business Models Disruptifs: impact sur les processus, les SI et les modes de management, » le Club des Pilotes de Processus et le Club URBA-EA ont réuni une centaine de participants le 21 septembre, dans les locaux d’E&Y. Georges Epinette,  President Club Urba-EA et Michel Raquin, Président Club des Pilotes de Processus, tirent les enseignements de ce symposium qui a fait une large place aux retours d’expérience. 

Les intervenants de haut niveau se sont succédé à la tribune pour partager leur expérience enrichissante à plus d’un titre. Le tout sans langue de bois, ce qui fait un bien fou dans le monde qui est aujourd’hui le nôtre.

Plusieurs modèles d’entreprises numériques


Nous avons coutume de dire qu’il existe plusieurs types d’entreprises auxquels sont arrimés des business-models  plus ou moins affirmés. On trouve ainsi l’entreprise numérisée : 90% d’entre elles ont adapté leurs processus aux nouveaux enjeux digitaux; l’entreprise numérique dont c’est la raison d’être;  l’entreprise uberisée : une forme d’entreprise numérique avec une fonction centrale et plateformique [1]; l’entreprise peer to peer: qui assure le liant entre acteurs dans une logique totalement collaborative[2].

Mais cette segmentation n’est pas toujours aussi radicale que cela et Corinne Genet – Professeur de Stratégie à l’EMSI de Grenoble – met en évidence les mix de modèles qui peuvent découler de l’imagination humaine. La question étant assez profonde et bien connue de tous les marketeurs.


Posséder un coup d’avance: est-ce répondre  aux besoins des clients ou anticiper leurs attentes? Corollaire de cette interrogation: les processus d’innovation  doivent se situer  au carrefour de l’imagination et des potentialités: ni trop tôt, ni trop tard, tout en ne renonçant pas aux « ruses d’usage » telles que l’entendait Michel de Certeau.

Proscrire le SI comme simple support

D’autant que les frontières sont abolies et que l’organisation agile embarque la notion de précarité et d’incertitude. C’est dire que le modèle de Porter – credo des stratégistes dans les années 90 – prend un sacré coup de vieux. L’occasion d’affirmer que la notion de structures dites de « support » -comme les SI- est complètement à reconsidérer, voire à proscrire.

Ça veut dire quoi ? Cela signifie que la problématique d’architecture doit être au centre de la transformation des entreprises. Cela signifie que les données et leurs artefacts numériques constituent la base de cette architecture Stratégique.

Et ce sujet doit être adressé aussi bien par les Directions Générales que les Conseils d’Administration. Enfin, cela suppose une relative dynamicité des processus. Des processus appelés à se reconfigurer au fil des enjeux.

Nous croyons que davantage qu’hier, nous avons intérêt à ne pas poursuivre les travaux de cartographie dans une logique prescriptive mais plutôt à accompagner les processus ex-post pour les rendre les plus efficients et le plus congruents possible au fil des transformations.

Au coeur des innovations et des ruptures

Cette dynamicité (re)met au cœur du débat la notion de BPMN dont les capteurs,  placés aux points clés,  viendraient qualifier et pérenniser – notamment – la pertinence des processus identitaires: ceux au cœur des innovations et des ruptures.

Ces bases étant posées, nous avons pu apprécier les interventions des  grands témoins de ce symposium. Hugues Le Bret, Président-Fondateur du Compte NICKEL, a raconté la belle histoire de son entreprise: une banque directe au service d’un dessein sociétal enthousiasmant partagé avec son réseau de distribution, les bureaux de tabac, au service de 380 000 bénéficiaires : tout cela avec une équipe de 90 personnes;

Yvan Wibaux, fondateur d’EVANEOS, a su  – comme agence de voyages numérique – passer de voyages standardisés de masse à un sur-mesure de différenciation pour ses clients, et qui a  atteint une autre ambition : celle de l’auto-organisation de ses collaborateurs combinant à la fois autonomie et responsabilisation. Belle leçon de management avec la mise en place des « Squads » d’innovation permanente.

SI et numérique complémentaires

On retiendra aussi l’intervention de Pascal Viginier, DSI de ORANGE,  à travers son concept d’usine digitale où la complémentarité des SI et du  numérique vient harmonieusement répondre aux objectifs de transformation de son Groupe. Le développement d’écosystèmes internes et externes contribuant au rayonnement de la démarche et à son accélération. On comprend-là – à travers les problématiques de dettes techniques, de Security by design – le défi qui est relevé. Chapeau !

L’intervention de Muriel Barneoud – Présidente de DOCAPOST – était tout aussi enthousiasmante puisqu’elle a placé l’homme au centre du dispositif de transformation et d’innovation : tant pour les collaborateurs de la Poste que pour ses clients. . Elle met en perspective un business model disruptif basé sur des univers de confiance pour les données, tant pour les entreprises que pour les particuliers, un modèle alternatif à ceux des GAFA qui captent les données de leurs clients.

Complémentarité plutôt que domination

Enfin, les interventions de Jean François Pirius de BMPS et Olivier Borie d’EY ont mis en évidence la nécessité pour nous – Architectes, Urbanistes, Responsables de Processus-, de retrouver absolument un espace de ré intermédiation avec les métiers dans un rapport de complémentarité et non de domination. Plutôt que le Far-West où les règles sont plus ou moins floues et acceptées, il nous faut (re)trouver le bon moment machiavélien : celui qui combine Fortuna et Virtu. C’est de cette façon, en changeant de perspective, que se trouve la vraie valeur ajoutée.

En conclusion: tous les acteurs – hier décrits comme faisant partie des « supports » –  doivent impérativement revisiter leurs  approches, mettre à bas les anciennes  doctrines – pour servir au mieux ces nouveaux modèles d’affaire. Il ne s’agit pas d’une contrainte mais d’un défi utile et stimulant à relever !

Bibliographie : Voir la notion d’entreprise « plateformique » développée par le Professeur A.Bounfour à travers les travaux du CIGREF  (Entreprise 2020);

lire notamment l’excellent livre de Michel Bauwens : « Sauver le Monde ».

[1] Voir la notion d’entreprise « plateformique » développée par le Professeur A.Bounfour à travers les travaux du CIGREF  (Entreprise 2020).

[2] lire notamment l’excellent livre de Michel Bauwens : « Sauver le Monde ».

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