Quatre associations de DSI, Cigref en France, Beltug en Belgique, CIO Platform Nederland aux Pays-Bas et Voice en Allemagne attirent urgemment l’attention des autorités européennes sur les comportements de Broadcom qu’elles considèrent comme inacceptables concernant les produits de virtualisation VMware. « Il est indispensable d’empêcher la ponction financière exorbitante, illégitime et stérile que Broadcom s’apprête à commettre au détriment de l’économie européenne » demandent-elles.
Un millier de grandes entreprises européennes s’insurgent
Ces quatre associations représentent mille grandes entreprises européennes utilisatrices de l’informatique. Elles ont envoyé un courrier à la Présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et à plusieurs responsables politiques français et européens.
Leur demande est que la Commission européenne prenne d’urgence les mesures nécessaires pour « résoudre ce désordre sur le marché de la virtualisation ». « De tels comportements nécessitent des interventions politiques et ne doivent pas être laissés aux seuls techniciens du droit de la concurrence » écrivent les DSI.
Demande de conseils à la Commission européenne
Ils estiment que la Commission européenne doit protéger les utilisateurs professionnels européens de VMware contre des pratiques abusives. « Nous avions anticipé le risque dans nos contributions à l’enquête sur l’acquisition de VMware par Broadcom » rappellent-ils. Ils souhaitent également agir de leur côté et souhaitent des conseils de la part des autorités. « Nous demandons des éclaircissements sur les actions qui peuvent être menées, par la Commission elle-même, mais aussi par nos associations et par les organisations [entreprises] qu’elles représentent » demandent les DSI.
Principaux extraits de la lettre envoyée à la Commission européenne :
Nous observons que le comportement de Broadcom semble contraire aux principes de concurrence loyale et pourrait être révélateur d’un abus. Cette conduite n’est possible qu’en raison du verrouillage des clients et de la forte dépendance des utilisateurs professionnels qui ont acquis et mis en œuvre des produits VMware.
Depuis son rachat de VMware, Broadcom a confronté ses clients à des changements soudains de politique et de pratiques entraînant une forte augmentation des prix ; un non-respect des accords contractuels antérieurs ; l’interdiction de la revente de licences ; le refus de maintenir des conditions de sécurité pour les licences perpétuelles ; le groupage des licences, entraînant des coûts plus élevés ; un bouleversement de l’écosystème des revendeurs et partenaires VMware et une perte de compétences.
Pour citer une partie de la lettre envoyée par CIO Platform Nederland, l’une des 4 associations : « Nos membres craignent avant tout une forte augmentation des prix qui leur est imposée par les nouveaux modèles tarifaires (par exemple en échangeant le modèle de licence d’utilisation perpétuelle contre un modèle d’abonnement) , ou la détérioration des conditions contractuelles, que Broadcom pourrait appliquer en raison de la dépendance de nos membres à l’égard des produits VMware. Cela s’est produit par exemple après le rachat de Symantec par Broadcom. »
Malheureusement, nous voyons aujourd’hui un exemple concret du pouvoir des grands fournisseurs – et de la manière dont ils vont l’utiliser. Nous appelons la Commission à agir pour mettre fin à de tels comportements contraires à l’éthique.
Il est absolument nécessaire de retarder les changements drastiques imposés unilatéralement par Broadcom. En outre, des mesures énergiques sont nécessaires pour garantir que d’autres fournisseurs ne suivront pas l’exemple inacceptable de Broadcom. L’approche de Broadcom ne peut pas devenir un précédent.
Les logiciels Cloud étant insuffisamment couverts par le DMA, les clients et les entreprises européennes lésés par ces pratiques déloyales dépendent des affaires anticoncurrentielles pour obtenir tout type de réparation.
Il est essentiel de considérer que, pour un utilisateur professionnel, poursuivre en justice un fournisseur dont votre organisation est extrêmement dépendante n’est pas une démarche souhaitée, par crainte de représailles.
La Commission devrait donc prendre des mesures définitives contre les géants du logiciel qui enferment leurs clients par un comportement déloyal.
Veuillez également noter que, étant donné que VMware joue un rôle important sur le marché du cloud privé, les alternatives pour les utilisateurs professionnels se trouveront dans le Cloud public. Cela renforcera encore la position et le pouvoir des hyperscalers [Google Amazon Microsoft NDLR], ce qui aura un impact profond sur l’ensemble du marché. Nous sommes convaincus qu’une action ou une communication de la Commission contre le comportement de Broadcom est nécessaire pour protéger l’avenir numérique de l’Europe.
Aujourd’hui, nous appelons la Commission européenne non seulement à donner son point de vue sur la situation, mais également à préciser quelles sont les pistes d’action qui s’offrent à la Commission, aux associations ou aux organisations concernées, pour faire face à cette situation, et également à décourager d’autres fournisseurs comme Broadcom d’agir de manière tout aussi contraire à l’éthique à l’avenir.
Cette affaire ne peut être laissée exclusivement aux techniciens du droit de la concurrence. Il s’agit d’une question dont les dimensions économiques et politiques doivent être pleinement comprises.
L’approche de Broadcom mobilise des ressources humaines dans les entreprises qui ne sont pas disponibles pour d’autres projets de numérisation, ralentissant ainsi leur transformation numérique.
Fin de la lettre